Violaine Gagnet, responsable du Pôle Urgences à CARE France nous présente les modalités d'intervention des équipes de CARE et l'organisation de l'action humanitaire dans les situations d'urgence.
CARE est un réseau humanitaire international, comprenant deux volets : développement et urgences. Pouvez-vous nous exposez en quoi consiste le travail des équipes d'urgence de CARE France ?
En tant que responsable du pôle, je supervise les réponses d'urgence apportées par CARE France et participe à l'action du réseau international. Notre service est composé de quatre personnes dont deux déployables sur le terrain en cas de crise.
Outre son travail conjoncturel aux côtés de CARE International, CARE France apporte un appui particulier au Liban où nous menons toutes les actions ainsi qu'au Cameroun où nous intervenons à l'est du pays auprès des réfugiés centrafricains et à l'extrême nord auprès des déplacés camerounais.
Comment se coordonnent l'envoi d'équipes et l'action des pays membres vis-à-vis de CARE International ?
Chaque pays membre dispose d'un pôle urgence composé pour partie de consultants et de personnels déployables lors des urgences. Au niveau du réseau, un organisme, le CARE Emergency Group (CEG), est chargé d'assurer leur coordination et de planifier les réponses d'urgence. Une équipe d'intervention rapide travaille au quotidien à anticiper et à répondre à ces situations.
Lorsqu'une crise se profile, trois acteurs interviennent, le bureau pays, le pays membre de CARE responsable de cette zone et le CARE Emergency Group (CEG). Ensemble, ils évaluent la situation en fonction de plusieurs facteurs : le nombre de personnes affectées, le type d'urgence (conflit, catastrophe naturelle...), les activités à mettre en place et les besoins exprimés par les populations locales.
Une fois la réponse d'urgence définie, CARE Emergency Group assure la communication avec le réseau en diffusant à chaque bureau la cible financière, le nombre de bénéficiaires attendus, les besoins requis en termes de ressources. Alors les pays membres se déploient en fonction de leurs expertises spécifiques : eau et assainissement, abris, sécurité alimentaire et santé sexuelle et reproductive.
L'aide d'urgence est présentée principalement comme une réponse caractérisée par la rapidité et l'immédiateté de l'action, mais elle est en réalité une action plus long terme. Expliquez-nous comment vous organisez votre travail dans les zones concernées ?
Effectivement, trois phases caractérisent notre réponse d'urgence : la préparation et l'anticipation, la réponse d'urgence et l'action plus long terme pour aider les populations à se relever.
·Tout d'abord, dans tous les pays où CARE travaille, des plans de préparation aux urgences sont mis en place afin d'identifier les potentiels risques, qu'ils soient politiques ou naturels.
Il s'agit en effet de mettre en place des actions en amont pour être prêts en cas de catastrophe. Anticiper ces situations consiste également à disposer de stocks de kits et de fonds afin d'être proactifs en cas de crise.
·Dans un troisième temps, une fois la réponse de première urgence apportée, il s'agit d'instaurer une stratégie long terme pour aider les populations à la reconstruction et la réhabilitation.
Par exemple, au Népal, où CARE travaille depuis 1978, la phase post urgence consiste à stabiliser la situation afin de revenir par la suite sur des actions de développement.
L'application de ces plans d'action n'est-elle pas rendue compliquée avec l'afflux des acteurs humanitaires sur place ? Comment se coordonne l'action de ces différents organismes ?
Effectivement la coordination peut-être difficile. Cela dépend de l'ampleur de l'urgence et de sa médiatisation qui peut attirer beaucoup d'acteurs qui n'ont pas forcément la même expérience terrain que CARE ou que les grandes ONG.
C'est pourquoi, dans la rédaction des plans d'urgence, il faut prendre en compte quelle serait la réponse des autres structures afin de ne pas dupliquer les actions mises en place. Tout est pensé en amont.
Au niveau international, pour assurer la cohésion entre les différents organismes humanitaires, les Nations Unies ont mis en place un Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA : Office for the Coordination of Humanitarian Affairs). Il cadre l'intervention collective et assure également la coordination entre les organisations internationales, ONG et les autorités locales.
CARE porte une attention particulière à la cause des femmes dans ses programmes. Comment de votre côté intégrez-vous l'aspect genre dans vos réponses d'urgence ?
Très souvent dans une crise les femmes sont les plus vulnérables parce qu'elles se retrouvent parfois seules, en charge de leur famille, et que de lourdes responsabilités reposent sur leurs épaules. Elles sont également beaucoup plus exposées aux violences. Nous l'observons malheureusement dans les camps de réfugiés où les abus envers les femmes augmentent de façon très forte.
Dans l'identification des personnes les plus vulnérables, CARE réalise des focus spécifiques sur les femmes et jeunes filles. Concrètement, cela se traduit par la mise en place de groupes de réflexion avec les femmes, d'échanges avec les leaders politiques et religieux pour comprendre comment les liens hommes-femmes fonctionnent dans ces sociétés.
Avant tout, les équipes mettent en place des actions répondant aux standards internationaux tels que la construction de latrines séparées entre hommes et femmes. Par ailleurs, CARE va développer son expertise en fonction du contexte et de sa connaissance des besoins sur le terrain. L'objectif est répondre au mieux aux besoins des populations, en évitant évidemment de dénigrer les hommes. CARE bénéficie sur ce sujet d'une grande expérience puisque la prise en compte des femmes rentre directement dans ses orientations stratégiques depuis de nombreuses années.