Quand une partie de l’aide humanitaire était déjà sur place, à Gaza
Depuis octobre et l’escalade de la crise à Gaza, CARE a soutenu plus de 317 000 personnes, distribué 153 000 litres d’eau, et assuré des soins médicaux à 68 000 personnes grâce à des cliniques mobiles. Au début de la crise, ces cliniques mobiles s’approvisionnaient directement dans les hôpitaux de Gaza. Mais aujourd’hui, seuls 8 des 36 hôpitaux sont encore partiellement fonctionnels (1), les autres ayant été détruits par les bombardements. Les routes et certains entrepôts humanitaires ont eux aussi été visés, détruisant les produits de première nécessité qui auraient pu être distribués à la population.
À présent que les médicaments, les produits de première nécessité sont en pénurie, l’aide humanitaire doit parvenir à Gaza depuis l’extérieur.
Le contexte pour mieux comprendre
La survie des 2 millions d’habitants de la bande de Gaza dépend aujourd’hui complétement de l’aide humanitaire. Une personne sur deux souffre déjà de faim « catastrophique » (2), le stade le plus élevé et le plus aigu du système de classification de l’insécurité alimentaire de l’IPC et le risque de famine est imminent.
Pourtant, les restrictions imposées aux frontières entravent gravement la capacité des acteurs humanitaires à fournir l’aide dont les populations ont cruellement besoin. « Entre janvier et février, les niveaux d’aide autorisés à entrer dans Gaza par Israël ont diminué de 50 % alors que les besoins augmentent de façon dramatique », alerte Hiba Tibi, directrice de CARE en Cisjordanie et à Gaza. Par exemple, l’entrée de carburant nécessaire pour les générateurs, les centres de santé et les infrastructures de production d’eau potable n’est autorisée qu’au compte-goutte.
Aujourd’hui, l’aide humanitaire doit entrer à Gaza malgré les obstacles
Le personnel et les partenaires de CARE vivent à Gaza. Nos équipes vivent les bombardements et les pénuries. Elles vivent, comme le reste de la population, dans des abris pour personnes déplacées, partageant souvent des tentes avec des dizaines de membres de leur famille ou des étrangers. Nos équipes savent donc ce dont les gens ont le plus besoin et comment nous pouvons leur apporter de l’aide. CARE est ainsi l’une des rares organisations internationales à opérer dans le nord de Gaza, en plus d’agir dans le sud, avec l’aide de nos partenaires de confiance. Mais la première difficulté à laquelle nous sommes confrontés quotidiennement est les coupures constantes des télécommunications qui complique considérablement l’acheminement de l’aide.
Malgré cela, grâce à 20 camions venant d’Égypte, l’ONG CARE a déjà distribué des kits d’hygiène et de l’eau potable à plus de 85 000 personnes. « Le manque d’eau était un énorme problème » , témoigne un bénéficiaire de l’ONG CARE dans un refuge pour personnes déplacées dans le sud de Gaza. « L’eau que nous buvions nous rendait malades car elle était souvent contaminée. Aujourd’hui, l’eau est saine et propre » .
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Défis logistiques et bombardements
Pour arriver à cela, nos équipes font face à des défis énormes, y compris une fois que l’aide humanitaire a franchi la frontière de Gaza. Au cours des dernières semaines, 22 camions par jour en moyenne sont entrés à Gaza. Avant le 7 octobre 2023, et avant donc l’augmentation dramatique des besoins, environ 800 camions entraient chaque jour. L’aide arrivant à Gaza est donc largement insuffisante. Et pour chaque camion qui arrive à la frontière égyptienne, les marchandises doivent être déchargées puis rechargées dans les quelques camions qui circulent toujours à Gaza. Ces camions multiplient alors les allers-retours entre la frontière et les lieux de distribution de l’aide à la population. Cela prend beaucoup de temps, d’autant plus que les routes ont été endommagées par les frappes aériennes et que, dans le sud, les rues de Rafah sont incroyablement saturées. 1,4 million de personnes sont entassées dans une zone dont la taille équivaut à environ la moitié de celle du Liechtenstein. Les rues sont pleines de gens, de tentes et de charrettes.
La poursuite des hostilités et des bombardements constitue un autre défi de taille pour acheminer l’aide. Les équipes de CARE risquent leur vie tous les jours en s’efforçant d’aider les autres. « Mes enfants me supplient tous les matins de ne pas sortir de l’abri. Ils craignent pour ma vie » , témoigne Saeed, coordinateur d’urgence de CARE à Gaza.
"Cette crise est une horreur pure et simple” - Samir, travailleur humanitaire
Malgré les dangers et difficultés, nous poursuivons notre travail. Samir* est originaire de Gaza. Membre de CARE Cisjordanie-Gaza, il vit cette crise loin de sa famille qui est prise au piège à Gaza : « ce qui me donne la force de continuer, c’est l’aide que je peux apporter à tous ces gens, des gens qui vivent la même horreur que ma famille. Je travaille aussi dur que possible pour leur fournir de l’eau potable, de la nourriture. Et on est aussi là pour leur rappeler qu’on ne les oublie pas » .
Tandis que Samir poursuit son travail humanitaire, sa famille et ses amis sont sous les bombes. « Tant de mes amis sont déjà morts. Leurs familles entières ont disparu. Il n’y a rien que je puisse faire pour comprendre comment cela est possible, à quoi cela sert et pourquoi cela continue encore et encore » . Les violences contre les populations civiles sont d’une rare intensité. Plus d’enfants ont été tués en seulement 4 mois dans la bande de Gaza qu’en 4 ans de guerre dans le monde entier (3).
Nos équipes à Gaza s’inquiètent de l’intensification des attaques sur Rafah, qui accueille la plupart des familles déplacées. Cela mettrait en danger la vie de centaines de milliers de personnes, cela signifierait également que les ONG ne pourraient plus acheminer d’aide à Gaza depuis l’Égypte. Or, les points de passage terrestre restent le moyen le plus simple, le plus immédiat et le plus rentable d’acheminer l’aide humanitaire dont Gaza a besoin de manière urgente. « Les efforts d’acheminement de l’aide par voies maritime et aérienne ne doivent pas être considérés comme un substitut à l’acheminement par voie terrestre », explique Hiba Tibi.
CARE renouvelle son appel à un cessez-le-feu immédiat, demande la garantie d’un accès à une aide humanitaire vitale pour tous les civils, la fin des attaques contre les populations et la libération de tous les otages.
*Nom modifié pour protéger l’identité de la personne
Sources : (1) OMS, citée par MSF, 2024 ; (2) IPC, 2024 ; (3) ONU, 2024 ; (4) ONU, 2024
L'action de CARE à Gaza
- L’ONG CARE opère à Gaza et en Cisjordanie depuis 1948. Outre nos actions à Gaza, nous continuons d’aider environ 300 000 personnes en Cisjordanie (agriculture, soutien économique aux femmes, programmes de santé axés sur la lutte contre les violences basées sur le genre, la santé sexuelle et reproductive et la santé mentale des enfants).
- Dans le cadre de sa réponse multi-crises, l’ONG CARE soutient les populations dans le besoin : Gaza, Maroc, Syrie… En soutenant notre Fonds d’urgence, vous nous permettez d’apporter une aide vitale lors de ces crises. Vos dons nous permettent de financer l’ensemble de nos actions d’urgence en fonction des priorités et des besoins.
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- 17 septembre 2024
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