Alors que la Conférence des Nations unies sur le climat vient de débuter à Paris, 14 parlementaires français ont signé une tribune soutenant les positions de CARE. Les parlementaires rappellent au gouvernement français et à l'Union européenne leur responsabilité dans l'élaboration d'un accord climatique ambitieux. Découvrez le texte de la tribune, également publié par le site d'information Huffington Post.
Au premier jour de la COP21, nous, parlementaires, alertons le gouvernement français sur sa responsabilité dans l'élaboration du futur accord climatique. La France affiche une réelle volonté d'aboutir à un consensus. Oui, mais lequel ? Seul un texte ambitieux, équitable, universel et contraignant pourra limiter les impacts du changement climatique. Pour cela, plusieurs points sont essentiels, tels qu'un engagement ferme des gouvernements pour limiter le réchauffement climatique à +1,5°C. Les Etats doivent aussi inscrire dans l'accord les notions de droits humains, d'égalité des genres et de sécurité alimentaire.
Seules ces conditions permettront de lutter contre l'injustice sociale créée par le changement climatique. Nous le savons, les dérèglements climatiques accentuent déjà les inégalités existantes, y compris entre les femmes et les hommes, et créent de nouvelles poches de pauvreté. En l'absence de mesures immédiates de réduction des émissions de gaz à effet de serre et de politiques de développement solidaires et durables, plus de 100 millions de personnes supplémentaires pourraient tomber sous le seuil de pauvreté d'ici 2030.
Nous ne pouvons pas fermer les yeux ou baisser les bras. La COP21 offre une opportunité sans précédent de donner un nouveau souffle à la lutte contre les causes et impacts du changement climatique. Afin de s'assurer que ce sont les bonnes solutions qui sont promues et financées, l'accord doit inclure des principes directeurs garantissant que chaque action de lutte contre le changement climatique respecte, promeuve et mette en œuvre les droits humains. Or, ce point est aujourd'hui loin d'être acquis. Deux options totalement contradictoires sont sur la table : soit ancrer ces droits fondamentaux dans l'accord, soit les ignorer complètement. Lors des dernières sessions de négociation, l'Union européenne, traditionnelle alliée sur ces enjeux, est restée anormalement silencieuse. Il est urgent qu'elle fasse de ces principes une condition sine qua non d'un accord juste et ambitieux.
Le succès des négociations dépendra également de la place accordée aux pays les plus vulnérables. Les pays en développement doivent être entendus car ils sont les premiers impactés par le changement climatique. Le Niger, par exemple, a dû faire face à quatre périodes de sècheresse entre 2006 et 2012. Avant cette date, le pays n'en avait connu que trois en 30 ans. Ce type de dérèglements climatiques impacte directement les cultures de base telles que le blé, le riz ou le maïs. 795 millions de personnes souffrent déjà de la faim dans le monde. Si rien n'est fait, ce chiffre pourrait augmenter de 600 millions de personnes supplémentaires d'ici 2080, à cause du changement climatique.
La communauté internationale doit faire preuve de solidarité envers les pays et populations les plus vulnérables. Sans financements, ces derniers ne pourront pas lutter contre le changement climatique. Aujourd'hui, nous nous associons à la société civile et aux demandes des ONG, telles que CARE, pour appeler à des financements à la hauteur des enjeux. Les Etats s'étaient engagés en 2009 à abonder le Fonds Vert pour le climat de 100 milliards de dollars par an d'ici à 2020. Aujourd'hui, seulement 10,2 milliards de dollars ont été annoncés (1). Nous demandons aux gouvernements de définir une feuille de route prévisible, transparente et révisable à la hausse pour respecter les objectifs qu'ils se sont fixés.
Les financements pour l'adaptation demeurent les parents pauvres de la finance climat (2), malgré les coûts actuels et à venir. A eux seuls, les coûts pour l'adaptation en Afrique sont estimés entre 50 et 100 milliards de dollars annuels d'ici 2050. Il est important qu'au moins 50% des financements climats soient tournés vers l'adaptation. Ceux-ci doivent être additionnels à l'aide publique au développement et versés sous forme de dons pour appuyer les populations vulnérables. La France doit être exemplaire dans la mobilisation de financements suffisants, adéquats et transparents. Ces financements doivent être complétés par des actions de suivi et de contrôle afin d'améliorer l'efficacité de l'aide. C'est pourquoi nous, parlementaires, nous sommes mobilisés pour une augmentation de l'aide publique au développement lors des récentes discussions budgétaires au Parlement.
La COP21 doit changer les règles du jeu et mettre un réel coup d'accélérateur pour une transition vers un monde sobre en carbone, résilient au changement climatique et juste pour tous les habitants de la planète. Nous appelons la France et l'Union Européenne à utiliser tout leur poids diplomatique et politique pour faire de ce souhait une réalité.
Les signataires
- Laurence ABEILLE, Députée Écologiste du Val-de-Marne
- Pouria AMIRSHAHI, Député PS des Français établis hors de France
- Julien AUBERT, Député Républicains du Vaucluse
- Jean-Luc BLEUNVEN*, Député Divers Gauche du Finistère
- Catherine COUTELLE, Députée PS de la Vienne
- Evelyne DIDIER, Sénatrice Communiste de Meurthe-et-Moselle
- Cécile DUFLOT, Députée Écologiste de Paris
- Brigitte GONTHIER-MAURIN*, Sénatrice Communiste des Hauts-de-Seine
- Chantal JOUANNO, Sénatrice UDI de Paris
- Michel LESAGE, Député PS des Côtes-d'Armor
- Didier MANDELLI*, Sénateur Républicains de la Vendée
- Philippe NOGUES, Député Divers Gauche du Morbihan
- Bertrand PANCHER, Député UDI de la Meuse
- Gabriel SERVILLE, Député Socialiste de Guyane
* En septembre 2015, ces parlementaires ont participé à un voyage d'étude à Madagascar organisé par CARE.
Un texte publié sur le Huffington Post
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