Un cap franchi vers une diplomatie féministe plus complète et cohérente ?

La stratégie dédiée à la diplomatie féministe de la France sera officiellement lancée ce 7 mars par le ministre Jean-Noël Barrot, bien que le texte final ne soit pas encore disponible dans son intégralité. Cette stratégie résulte d’un long travail de consultation avec les organisations féministes et la société civile.

Attendue depuis 2019, année où le gouvernement s’était engagé publiquement à adopter une politique étrangère féministe (1), cette stratégie, désormais interministérielle, définit les piliers et priorités de la France jusqu’en 2030, dans toutes les dimensions de sa politique étrangère – commerciale, climatique, de développement, humanitaire et de défense.

Une avancée notable bien que la France n’ait pas encore pleinement adopté une approche véritablement systémique et intersectionnelle qui permettrait d’aborder de manière plus globale les inégalités multiples, notamment celles liées aux héritages du colonialisme, au patriarcat et aux discriminations croisées.

Un lancement dans un contexte de recul des droits et de coupes budgétaires

Ce lancement intervient dans un contexte mondial instable et inquiétant marqué par la montée de mouvements réactionnaires et anti-droits qui menacent les droits fondamentaux des femmes, des adolescentes, des filles et des personnes LGBTQIA+. En parallèle, l’aide publique au développement (APD), levier essentiel pour promouvoir l’égalité de genre dans le monde, subit partout des attaques et des réductions sévères.

Aux États-Unis, la suppression de 63 milliards de dollars d’USAID depuis janvier 2025 par l’administration américaine a déjà des répercussions dramatiques sur l’accès à la santé, à l’éducation et sur les droits sexuels et reproductifs. En Europe, plusieurs pays réduisent leur engagement en matière d’APD, y compris les financements dédiés au genre, fragilisant ainsi les progrès réalisés ces dernières années.

En France, le gouvernement et les parlementaires ont adopté une réduction de budget de plus de 2 milliards d’euros pour l’APD impactant de fait l’instrument fer de lance de la diplomatie féministe française, le Fonds de soutien aux organisations féministes (FSOF). Une situation qui questionne les ONG et associations féministes : Comment être à la hauteur d’une diplomatie féministe plus ambitieuse avec moins de moyens financiers ?

Des engagements financiers nécessaires

En effet, si le lancement de cette stratégie constitue une étape importante, elle ne sera crédible que si elle s’accompagne de financements solides et durables, ainsi que d’un portage politique à haut niveau et dans tous les domaines de la politique étrangère.

À quelques mois de la quatrième conférence mondiale sur les politiques étrangères féministes, qui se tiendra en France en juin, les ONG et associations féministes appellent le gouvernement à impérativement rectifier le tir. Selon elles, il est urgent de :

  • Protéger, renforcer et pérenniser le Fonds de soutien aux organisations féministes (FSOF) au-delà de 50 millions d’euros par an jusqu’en 2027, un levier crucial pour soutenir les actrices féministes face aux offensives des mouvements anti-droits.
  • Corriger la trajectoire budgétaire dès 2026 en rétablissant une APD conforme aux engagements pris par les parlementaires en 2021 dans la loi de programmation sur la solidarité internationale : 75 % de l’APD bilatérale programmable doit intégrer l’égalité femmes-hommes et 20 % être spécifiquement dédié à cette cause d’ici 2025. Cet engagement doit être maintenu malgré les coupes budgétaires et renforcé dès 2026 à hauteur de 85 %, afin d’assurer des financements cohérents avec les ambitions féministes et de permettre le déploiement de la stratégie de diplomatie féministe portée par la France.

La société civile pleinement mobilisée pour la mise en œuvre de la diplomatie féministe française

Les ONG et associations féministes saluent le lancement officiel de cette nouvelle stratégie tant attendu et restent pleinement mobilisées et vigilantes. La publication de la version complète ne peut être repoussée plus longtemps : il est impératif qu’elle soit finalisée sans délai.

La diplomatie féministe sera d’autant plus efficace qu’elle garantit une réelle cohérence entre l’ensemble des politiques publiques extérieures de la France. Elle ne doit pas se limiter à un simple affichage politique, elle doit être le point de départ d’une véritable politique étrangère féministe ambitieuse, dotée d’un cadre de redevabilité, d’un suivi avec la société civile et de moyens nécessaires pour relever les défis actuels.

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