En Inde, CARE soutient les populations marginalisées à faire face aux impacts du changement climatique. Louise Bonnet, membre de notre équipe « climat », revient d’une mission de soutien à nos équipes locales. Elle a été marquée par l’ampleur des dégradations environnementales dans le centre-est de l’Inde mais aussi par la capacité d’innovation des communautés avec lesquelles nous travaillons.
Quels sont les impacts du changement climatique en Inde ?
Les effets du changement climatique sont disparates. Si certaines régions subissent d’intenses périodes de mousson pouvant engendrer inondations et glissements de terrains, d’autres font face à des vagues de chaleur, des pluies erratiques et des sécheresses récurrentes.
Par exemple, dans l’État du Chhattisgarh,où CARE travaille, les précipitations ont baissé en moyenne de 10 à 15% entre la première et la seconde moitié du XXe siècle
Comment les populations perçoivent le changement climatique ?
Le changement climatique impacte très inégalement les populations selon leurs conditions sociales (caste, ethnie, sexe, etc.). Les populations les plus vulnérables en sont souvent les premières victimes.
CARE soutient les communautés Adivasi, des populations tribales historiquement marginalisées, qui constituent 63% de la population du district de Jashpur dans le Chhattisgarh. Elles dépendent fortement des ressources naturelles et de l’agriculture pluviale pour subvenir à leurs besoins. Outre les effets du changement climatique, les habitants doivent composer avec des sols de plus en plus dégradés, des mécanismes fragiles de gestion de l’eau et un accès inégal aux ressources et à l’information.
Ces communautés font face à une baisse des rendements et à un allongement des périodes de soudure. Face à ces difficultés, nombre d’habitants sont contraints de migrer en ville ou de travailler dans les mines pour pouvoir subvenir à leurs besoins.
Quelles sont les actions de CARE sur le terrain ?
Depuis 2011, CARE mène un projet d’adaptation au changement climatique dans le Chhattisgarh : Where the rain falls.
Suite à des analyses participatives, nous avons accompagné les populations à développer des plans d’adaptation à base communautaire, nous avons soutenu la mise en place de mécanismes équitables de gestion de l’eau, de pratiques agro-écologiques et d’accès à l’information climatique. Des écoles agricoles ont été créées car, en associant savoirs traditionnels et innovations, les populations peuvent mieux anticiper les risques, planifier leurs activités et ainsi mieux s’adapter aux effets du changement climatique.
Nos équipes travaillent aussi à la diversification des sources de revenus grâce à la création d’associations d’épargne et de crédit. Enfin, nous encourageons la participation active des femmes aux prises de décisions de la communauté. Lors de ma mission, de nombreuses femmes m’ont confié qu’elles ne craignaient plus de prendre la parole en public et de défendre leurs droits.
Ce projet donne du sens à la notion de justice climatique. La clé de notre réussite réside dans l’articulation de composantes techniques – hydrauliques et agricoles – avec un développement communautaire fondé sur les droits. Ce combo reflète l’approche transformative que CARE promeut pour un développement juste et durable.
Que reste-t-il à faire ?
J’ai été frappée par l’ampleur des dégradations environnementales et le cercle vicieux qu’elles engendrent. Les industries extractives – notamment les mines de charbon – et l’agriculture sur brûlis exacerbent la dégradation des sols, la pollution atmosphérique, les maladies respiratoires et le tarissement des sources d’eau de surface et souterraine. À cause de la déforestation, on note aussi une multiplication des attaques de village par les éléphants forcés à migrer pour chercher de la nourriture.
Le plaidoyer et l’éducation sont des points primordiaux pour garantir un changement de mentalité qui s’inscrive dans la durée. Si l’adaptation est une priorité pour les populations vulnérables, la réduction des émissions de gaz à effet de serre doit aussi être au cœur des priorités gouvernementales. L’Inde, 3e pays émetteur de gaz à effet de serre, veut mettre l’accent sur les énergies renouvelables mais continue d’exploiter le charbon. Pourtant, les scientifiques sont unanimes : plus de 80% des réserves connues de charbon doivent rester dans les sols pour pouvoir limiter le réchauffement planétaire en deçà de 2°C.