Le problème : à Madagascar, les filles et les femmes souffrent du tabou sur les règles

Au sein de la communauté de Sakaivo Nord, dans la région d’Amoron’i Mania, les menstruations étaient très stigmatisées et entourées d’un fort tabou. Les règles étaient perçues comme quelque chose de « sale ». Les conséquences : des femmes et des filles étaient systématiquement isolées, exclues de chez elles lorsqu’elles avaient leurs menstruations. Elles dormaient alors dans des huttes. L’étude de J-PAL a également révélé que près d’1 fille sur 2 pensait mériter d’être punie si son frère découvrait qu’elle avait ses règles.

La société interdisait toute discussion sur le sujet, même entre les filles et leurs propres mères. Faute d’informations sur le sujet, les femmes utilisaient des tissus inappropriés pour gérer leurs règles. Et les familles les plus pauvres ne disposaient parfois même pas de sous-vêtements sur lesquels apposer ces tissus. C’est un problème très répandu dans le monde. À cause de cela, beaucoup de filles et de femmes manquent l’école ou leur travail. Aussi, forcées d’utiliser des alternatives de fortune et dangereuses, trop souffrent ou meurent d’infections évitables !

Berthe, couturière de 51 ans dans la commune Alakamisy Ambohimahazo, témoigne : « quand j’étais jeune, je vivais mes menstruations comme un handicap » . Le cas de cette communauté n’est malheureusement pas une exception. Dans les zones rurales de Madagascar, il existe encore une forte stigmatisation des menstruations. En parallèle de ce constat, une statistique est particulièrement préoccupante : à Madagascar, seulement une fille sur quatre termine le collège (1).

Le tabou des règles se répercute négativement sur l’éducation des filles

Les écoles ne sont pas toujours pourvues d’infrastructures sanitaires adaptées ou fonctionnelle. Par exemple, en-dehors des écoles où CARE intervient et selon l’enquête de J-PAL menée dans la région Amoron’i Mania, seules 34% des écoles ont des toilettes qui se verrouillent. De plus, il peut être très compliqué pour les filles de se procurer des protections menstruelles. Ces deux facteurs combinés, qui s’ajoutent aux moqueries sur tout ce qui concerne les règles, jouent sur l’assiduité scolaire des filles.

Pour remédier à ce problème et lutter contre la précarité menstruelle, l’ONG CARE a mis en place des formations dans les écoles. En sensibilisant les élèves sur les menstruations et sur l’hygiène et montrer que les menstruations sont un phénomène naturel, en installant des sanitaires adaptés et en procurant des serviettes hygiéniques lavables fabriquées par des couturières locales comme Berthe, nous avons participé à lutter contre le tabou des règles. Dorénavant, les filles et les femmes peuvent avoir leurs règles sans risquer de se tacher, ce qui réduit les stigmatisations.

L'ONG CARE lutte contre le tabou des règles à Madagascar.
© CARE
L'ONG CARE lutte contre le tabou des règles à Madagascar.
© CARE

« J’hésitais à parler des règles avec mes filles, c’était un sujet délicat. Maintenant, ce sont elles qui m’enseignent beaucoup à ce sujet, grâce à la formation qu’elles ont eue sur la gestion de l’hygiène menstruelle ! » – Rinah, mère de deux filles Laurence et Marcellinah

« Depuis que le projet a commencé, les discussions en famille sur l’hygiène deviennent plus faciles, plus fluides. Il n’y a plus de problème à parler des serviettes hygiéniques par exemple » – Jean Bosco, enseignant formé par l’ONG CARE et parent d’élève.

« Maintenant, même en période de menstruation, nous sommes assidues aux entrainements et aux matchs car nous utilisons les serviettes hygiéniques lavables. Plus de peur de fuite, nous nous sentons sécurisées » – Floris, 17 ans, soutenue par l’ONG CARE.

Les résultats de l’étude : quelles sont les conséquences du projet sur l’éducation des filles ?

Notre objectif, avec la réalisation de cette étude d’impacts réalisée par J-PAL était de déterminer si réduire la stigmatisation des règles et encourager les discussions positives sur des sujets tabous pouvait avoir un impact sur l’augmentation des capacités des filles et leur volonté de se rendre à l’école (2).

Le verdict : les résultats scolaires des filles ont nettement augmenté ! La probabilité pour les filles de réussir leurs examens de fin d’année est passée d’1 chance sur 2 à 60% avec l’implémentation du projet. Sur le long terme, lutter contre le tabou des règles et contre la précarité menstruelle permettra donc sûrement aux filles de rester plus longtemps à l’école, avec de meilleurs résultats (3). Et donc, de leur permettre plus librement de choisir leur futur !

Nous n’allons bien évidemment pas en rester là et continuer nos efforts. Nous faisons le bilan et tirons les leçons de chacun de nos projets dans le monde, mais la collaboration avec J-Pal un institut de chercheurs nous a permis d’aller plus loin : d’avoir un regard externe et scientifique sur notre impact. C’est là tout l’avantage de se positionner en tant qu’organisation apprenante : en explorant toutes les réponses qu’il est possible d’apporter de façon pertinente à un problème posé et en nous remettant en question, on s’assure de soutenir le mieux possible les populations.

Sources : (1) Unicef, 2023 ; (2) Fonds d’Innovation pour le Développement, 2023 ; (3) J Global Health, 2018 

CARE soutient les populations à Madagascar

Dans le cadre du projet Kilonga, CARE et ses partenaires aident les filles à vivre leurs règles dignement. Ce projet est financé par l’association Aider les autres et l’étude réalisée par J-PAL est soutenue financièrement par le FID (Fonds d’Innovation pour le Développement).

L’association CARE lutte contre la pauvreté et les inégalités à Madagascar depuis 1992. Nous apportons une aide aux populations les plus vulnérables avec des impacts concrets et durables.

Pour mettre fin aux injustices dans le pays, CARE se mobilise via :

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