Les conditions de vie des femmes et des filles népalaises se sont encore aggravées suite aux séismes qui ont touché le Népal. CARE a demandé aux femmes affectées par ces catastrophes quels étaient leurs principaux besoins. Découvrez une série de témoignages et l'analyse de nos équipes féminines.
Le Népal, un contexte difficile pour les femmes
Même avant les séismes, les conditions de vie des femmes et des filles au Népal étaient très difficiles. Près d'un quart des femmes âgées de 15 à 49 ans ont été victimes de violence physique, selon une enquête nationale. Les mariages précoces et le travail forcé sont également très répandus. Les femmes sont considérées comme impures durant leurs règles et n'ont pas accès à la citoyenneté sans l'accord de leur père ou mari.
L'autonomisation des femmes et des filles est au cœur des actions du bureau népalais de l'ONG CARE, crée en 1978. Les équipes d'urgence de CARE, mobilisées suite aux séismes, vont soutenir les femmes et des filles dont la vulnérabilité risque encore de s'aggraver.
Sukuma, 38 ans : « Une maison est ce qu'il y a de plus important »
« J'étais chez moi lorsque le séisme a frappé. La maison s'est effondrée. Pendant 30 minutes, j'ai essayé de sortir des décombres avec mes deux enfants. Je me suis blessé aux jambes, elles me font encore mal aujourd'hui. Aucun médecin n'est venu au village pour le moment. Mon bébé est malade et souffre de diarrhée depuis la catastrophe.
Nous devons dormir dans un grand abri avec une centaine d'autres personnes. J'ai peur que quelqu'un vole mes affaires. J'ai beaucoup de mal à dormir à cause des répliques sismiques. Je suis effrayée par tout maintenant. Pour moi, le plus important aujourd'hui est de reconstruire notre maison. Avoir une maison est ce qu'il y a de plus important, c'est la première chose à faire. »
Sansara, 22 ans : « Je veux que mes enfants soient en bonne santé »
« Mon bébé de sept mois et moi avons été blessés par des pierres qui sont tombées sur notre maison. Ma jambe me fait toujours mal. Mon mari avait prévu de partir travailler en Arabie Saoudite. Je suis tellement soulagée qu'il soit encore là.
Je suis surtout inquiète pour mes enfants. Ils ont peur et pleurent toutes les nuits. Nous vivons dans une tente. Nous sommes onze personnes dans un espace très petit. Les toilettes de notre maison sont cassées et j'ai peur que nous tombions malades. Je suis soulagée d'avoir reçu des articles d'hygiène des équipes de CARE. Nous pouvons maintenant nous protéger des maladies.
Nous sommes physiquement et mentalement très faibles. Nous avons déjà trop souffert, nous ne pourrons pas supporter d'autres catastrophes. »
Indula, experte en santé maternelle pour CARE au Népal : « Il faut aider les femmes enceintes pour éviter d'autres tragédies »
« Déjà avant le tremblement de terre, le Népal comptait l'un des taux de mortalité maternelle les plus élevés au monde : 170 décès sur 100 000 grossesses et accouchements.
14 000 femmes doivent accoucher au cours des quatre prochaines semaines. Environ 2 000 d'entre elles risquent de connaître des complications qui nécessiteront des soins obstétricaux d'urgence. La plupart vivent dans des zones reculées et doivent marcher plusieurs heures avant d'atteindre la clinique la plus proche.
Le séisme a endommagé ou détruit des centaines de centres médicaux. Les hôpitaux sont débordés : plus de 20 000 personnes ont été blessées lors du séisme. Pour le personnel soignant, la situation se complique de jour en jour. Ils ne disposent pas de l'équipement nécessaire et beaucoup ont eux-mêmes été affectés par le séisme.
CARE et d'autres organismes travaillent sans relâche pour venir en aide aux femmes enceintes et aux jeunes mères, en distribuant des kits d'accouchement et des kits d'hygiène. Nous mettons en place des cliniques mobiles dans les zones reculées. Nous devons nous assurer que donner la vie ne se transforme pas en une autre tragédie pour ces femmes déjà affectées par le séisme. »
Gita, 57 ans, et sa fille Ishwori, 20 ans : « Un abri, de la nourriture et de l'eau, nous avons besoin de tout »
« Ma fille Ishwori s'est gravement blessé la jambe lorsque notre maison s'est effondrée lors du premier séisme. Je suis restée avec elle et j'ai pris soin d'elle à l'hôpital. Notre maison a été complètement détruite et tous nos animaux ont été tués. Lorsque le second séisme a frappé, j'étais dans une tente près du centre sanitaire. La première chose que j'ai faite, c'est de me ruer hors de la tente vers l'espace dégagé le plus proche. J'étais très inquiète pour ma fille qui était dans le centre. Je suis soulagée que ma famille soit saine et sauve.
Désormais, tout est source de problèmes : l'abri, la nourriture, l'eau potable... Je pleure quand je pense à ma maison et à mes conditions de vie actuelles.
Lorsque le second séisme a frappé, il n'y avait plus rien à détruire dans mon village. Tout a été dévasté par le premier tremblement de terre. Encore aujourd'hui, j'ai peur d'entrer dans ce qu'il reste de ma maison et qu'un autre séisme survienne, donc je n'ai rien pu récupérer. J'ai peur de mourir. Je ne veux même pas penser à ce que nous allons devenir. »
Yashoda, 26 ans, membre de l'équipe genre de CARE : « Nous luttons contre les mariages d'enfants »
« Je parle avec des personnes affectées par le séisme tous les jours. Ils restent forts. Ils ont peut-être perdu leur maison, mais ils n'ont pas perdu espoir.
Mais pour les femmes et les filles, la situation est très difficile. Nous craignons que le trafic d'êtres humains ou les mariages d'enfants soient considérés comme une forme de protection et un moyen de soulager la charge financière des familles.
CARE travaille avec des travailleurs communautaires pour sensibiliser les populations contre les violences faites aux femmes et offrir un soutien. »
Samjhana, 35 ans : « Nous ignorons où nous pourrons reconstruire notre maison »
« J'étais chez moi quand le séisme a frappé. Mon mari travaillait dans le champ. Mon fils vit en Inde. Quelques secondes après que je sois sortie, notre maison s'est effondrée. Nous vivions ici depuis deux ans. Cette maison avait été construite en deux semaines par 70 personnes de notre village. Maintenant, il n'y a plus rien.
Tous nos voisins doivent reconstruire leur maison. Nous avons mis en place un comité de reconstruction, mais il y a de nombreuses difficultés. Mon mari et moi ne possédons pas de terre, nous avions eu le droit de construire sur un terrain public. Nous ne pouvons pas rebâtir au même endroit car le séisme a provoqué d'énormes fissures et il y a eu un glissement de terrain. Malheureusement, il n'y a plus de terrain public disponible dans notre village. Nous ignorons où nous pourrons reconstruire notre maison.»
Indu, coordinatrice du programme égalité des genres pour CARE au Népal : « Il faut soigner les traumatismes »
« Beaucoup d'enfants sont traumatisés par les séismes qui ont eu lieu. Les mères nous expliquent que leurs enfants ne veulent plus rester seuls, ils les suivent partout. Les écoles vont reprendre progressivement, mais des centaines d'entre elles sont totalement détruites. Les parents et les professeurs nous confient que de nombreux enfants ne sont pas encore prêts à retourner à l'école.
CARE et d'autres ONG prévoient de fournir une aide psychosociale aux personnes affectées par les séismes. Il faut que les Népalais puissent parler de ce qu'ils ont vécu, partager leurs peines et leurs inquiétudes. Se remettre d'une telle catastrophe prend du temps. Les familles ont perdu leurs maisons, certains ont perdu des membres de leur famille et des biens. Ils devront non seulement reconstruire leur maison mais aussi soigner ces blessures invisibles. »
Soutenez le Népal
CARE a lancé un appel à dons de 40 millions de dollars (37 millions d'euros) pour venir en aide à 100 000 personnes des communautés les plus touchées par les séismes qui ont frappé le Népal. CARE fournit une aide d'urgence aux personnes affectées par la catastrophe au Népal et aide les communautés à se reconstruire. A ce jour, 12,8 millions de dollars (11,6 millions d'euros) ont été récoltés à travers le monde.