Après avoir fui leur pays d’origine il y a une dizaine d’années, plus de 30 000 Somaliens ont quitté le Yémen pour rentrer chez eux. Ils fuient encore une autre guerre. Découvrez le témoignage de Mariam.
« J’ai l’impression que nous sommes suivis par la guerre »
Mariam est assise sur un matelas en plastique. Le vent souffle et menace de balayer son abri à tout moment. La pluie traverse les murs en carton.
« Je ne voulais pas rentrer chez moi dans ces conditions. J’ai toujours pensé que si je retournais en Somalie, c’est parce que les choses se seraient améliorées. »
Il y a 17 ans, Mariam a fui Mogadiscio. Sa mère et l’un de ses frères avaient été tués.
« Au Yémen, on avait pris l’habitude de vivre dans des camps de réfugiés. À Aden, nous nous sommes bâtis une vie. J’ai eu huit enfants, mon mari travaillait comme pêcheur et je tenais un petit kiosque. Mais la guerre s’est aggravée et nos vies étaient menacées. Nous manquions de nourriture. J’avais peur. J’ai cru que nous allions mourir de faim », explique Mariam.
Au Yémen, les discussions de paix prévues mi-novembre n’ont pas encore eu lieu. Plus de 14 millions de personnes souffrent désormais d’insécurité alimentaire. Soit deux millions de plus qu’en juin et quatre millions de plus qu’en mars.
Plus de 100 000 personnes ont fui le Yémen depuis mars 2015
Parmi eux, plus de 30 000 Somaliens. Mariam et sa famille sont parties il y a quatre mois.
« Nous avons laissé le peu que nous possédions au Yémen », raconte Mariam.
Mariam était enceinte de sept mois lorsqu’elle s’est lancée dans ce voyage périlleux à travers le golfe d’Aden. La guerre au Yémen, les mois passés sans nourriture, et le choc de devoir fuir une fois encore ; tout ça était de trop. Sur le bateau bondé, Mariam a perdu son enfant.
« Je saignais et les gens criaient à l’aide. Mais il n’y avait rien ni personne pour nous aider. J’ai fini par m’évanouir. »
Une situation humanitaire difficile en Somalie
Mariam et sa famille sont arrivées au Puntland, une région du nord-est de la Somalie autoproclamée autonome. Ils ont été conduits au camp de Jawle où vivent environ 20 000 personnes.
« Ici, les gens n’ont presque rien. Mais quand nous sommes arrivés, ils ont partagé le peu qu’ils avaient avec nous. Certains nous ont donné de matelas, d’autres nous ont aidés à construire une tente avec des bouts de bois et du carton », dit Mariam.
Les nouveaux arrivants ajoutent une pression supplémentaire dans un pays qui abrite déjà plus d’un million de déplacés internes – c’est l’un des nombres les plus importants au monde. Ces personnes dépendent de l’aide humanitaire pour subvenir à leurs besoins fondamentaux. Le manque de ressources rend la situation des réfugiés très précaire.
Pendant qu’elle parle, Mariam caresse avec douceur la tête d’un de ses garçons.
« Mon fils est handicapé. C’est ce qui m’inquiète le plus. Il n’y a rien ni personne pour l’aider ici, et sa situation empire de jour en jour.
C’est la première fois que je viens dans cette région. Je n’ai pas l’impression d’être rentré chez moi. J’ai l’impression de ne plus avoir de lien avec aucun pays. L’endroit où je vis n’a pas d’importance, tant que l’on y trouve la paix, du travail, une école et des soins médicaux pour mes enfants. »
L’action de CARE
CARE travaille en Somalie depuis 1981. Nos équipes apportent une aide d’urgence aux réfugiés somaliens qui rentrent chez eux. Dans le camp de Jawle, CARE a mis en place des programmes de rémunération du travail, de ramassage des ordures. Nos équipes soutiennent également un programme de santé et d’hygiène. Elles ont formé des femmes pour soutenir les victimes de violences sexuelles.